Pour faire l’expérience de la culture canadienne, explorez la scène florissante du théâtre de langue française en Ontario

Il y a plus de choses dans le ciel et sur la terre que n'en rêve votre dramaturgie anglaise.

Photo by Loïc Gauthier Le Coz

Photo par Loïc Gauthier Le Coz

Adam Lam

(FR) Cet article est produit en collaboration avec The Strand, le journal étudiant de Victoria University. Vous pouvez lire cet article en anglais chez The Strand au lien suivant : https://thestrand.ca/to-experience-canadian-culture-explore-ontarios-thriving-scene-of-francophone-theatre/

(EN) This article is produced in collaboration with The Strand, Victoria University’s student-run newspaper. You can read this article in English at The Strand at : https://thestrand.ca/to-experience-canadian-culture-explore-ontarios-thriving-scene-of-francophone-theatre/


Dillon Orr, directeur artistique suppléant du Théâtre du Nouvel-Ontario, se penche en arrière, les bras croisés, pour exprimer son point de vue sur les différences de perspective entre le théâtre de langue française et le théâtre de langue anglaise en Ontario. 

« Le théâtre francophone n'a pas été créé comme Shakespeare, comme le théâtre des Anglais ou comme le théâtre des Américains », explique-t-il. Il se penche, les bras dépliés, et nous apprend que les histoires racontées dans les représentations théâtrales francophones visent souvent à explorer les questions auxquelles les communautés sont confrontées collectivement, par opposition aux questions auxquelles l'individu est confronté.

Lors des entrevues avec le Strand, en collaboration avec La Mosaic, les directeurs artistiques du Théâtre du Nouvel-Ontario et du Théâtre français de Toronto — le premier desservant Sudbury et le second le centre-ville de Toronto — ont parlé de leur expérience en matière de théâtre de langue française pour les gens de l'Ontario. 

Pourquoi se passionne-t-on pour le théâtre francophone ?

Orr évoque son histoire personnelle pour illustrer la distinction entre le théâtre français et le théâtre anglais. « Quand j'étais à l'école de théâtre à l'École nationale de théâtre à Montréal, [c]était une école bilingue », dit-t-il. « On voit les deux côtés de la tâche à faire ».

« Le cliché, c'est que les anglophones, quand ils font du théâtre, c'est de l'intérieur vers l'extérieur… ils commencent avec toutes leurs émotions », dit-t-il. Il explique que l’objectif du théâtre anglais est souvent de permettre au public de faire l’expérience de la catharsis — l’accumulation d’émotions négatives pendant une tragédie, suivie de leur libération — ou de la mimesis, une représentation réaliste qui agit comme un miroir de la société.

« Puis en français, c'est l'opposé », dit-t-il. Selon Orr, le point de départ du théâtre francophone est l'observation de la société, puis le développement de questions sociales sur la société, et enfin l'exploration des conséquences de ces questions sociales sur nos émotions. Pour mener à bien ces explorations, Orr note que le théâtre français préfère souvent les histoires racontées à travers des fables, plutôt que directement à travers des représentations réalistes.

Orr est passionné par l'importance de l'expérience théâtrale en tant que partie intégrale de l'expérience humaine. « [Le théâtre c’]est un divertissement de nos cerveaux, ça nous fait penser autrement, ça nous fait requestionner notre rapport à ce monde, ça nous fait questionner notre rapport à l'art, à l’autre. » dit-t-il. « On est continuellement dans ces questions-là. »

En plus de la création d’une expérience théâtrale distincte de langue anglaise, Karine Richard — directrice artistique du Théâtre français de Toronto — souligne la valeur que les spectateurs peuvent trouver dans l'exploration des œuvres théâtrales.

Pour Richard, la présentation des pièces de théâtre francophones est importante, parce qu’elles jouent un rôle essentiel pour la communauté francophone. « Il est important d'établir des liens entre la région du Grand Toronto et Toronto, et les différentes communautés qui nous entourent » dit-t-elle, ce qui peut aider les habitants à mieux comprendre les questions et les problèmes auxquels sont confrontées les autres communautés. De cette manière, la représentation théâtrale peut contribuer à la création d’une compréhension mutuelle entre différentes cultures.

Orr et son équipe présenteront prochainement une œuvre théâtrale intitulée Nickel City Fifs en juin, une coproduction avec Alex Tétreault pour le Théâtre du Nouvel-Ontario. Le spectacle explorera la double minorisation des francophones et des homosexuels, en particulier dans une petite communauté comme celle de Sudbury, dit Orr. « On le présente à même le bar gai ici à Sudbury, qui s'appelle Zig’s » — l'un des premiers bars gais du Grand Sudbury.

Du 8 au 26 mars, le Théâtre français de Toronto propose également une performance théâtrale immersive intitulée Le Concierge, qui a lieu dans une école durant ses heures de fermeture. Dans cette production, explique Richard, un public limité à 15 personnes est invité à suivre un acteur dans le couloir d'une école secondaire de Toronto. « Je ne pense pas qu’il y avait beaucoup d'expériences de ce type à Toronto, où … les participants peuvent également s'habiller en concierge et le suivre tout au long de son histoire », dit Richard. Elle ajoute que l'expérience vise à attirer l'attention sur les travailleurs invisibles de la société.

Comment participer à la culture francophone en Ontario

Pour les membres de la communauté de l’Université de Toronto qui cherchent à améliorer leur connaissance du théâtre francophone, Orr encourage la participation aux productions théâtrales locales : « Le théâtre communautaire… est une super façon de s'impliquer, théâtralement parlant, communautaire et/ou amateur. »

Elahe Marjovi, gestionnaire du programme pour théâtre et grandes institutions au Conseil des arts de Toronto (CAT), suggère aussi quelques opportunités pour les membres de la communauté de l'Université de Toronto qui veulent s'impliquer dans le théâtre français, dans une correspondance écrite avec The Strand et La Mosaic.

Pour s'impliquer dans des programmes existants, Marjovi partage une liste d'organisations artistiques francophones actives basées à Toronto et financées par les subventions du CAT. Elles sont ouvertes aux candidatures en français ou anglais pour ceux qui sont intéressés à lancer leurs propres initiatives. Outre le Théâtre français de Toronto, les membres de la communauté peuvent consulter le Laboratoire d'Art pour les arts visuels et médiatiques, le Salon du livre de Toronto pour les arts littéraires, et BoucharDanse pour la danse, afin d'explorer l'expression culturelle francophone à Toronto.

Richard encourage vivement les membres de la communauté à s’impliquer davantage dans l'expression artistique en direct. « Je trouve que notre génération est bloquée sur Netflix et la télévision... où l'on est passif devant l'écran », dit-elle. « Venir au théâtre et aux arts vivants, n'importe quel type d'art vivant, est une façon de s'immerger dans l'art et de faire partie de la conversation au lieu d'être passif et de recevoir quelque chose. »

Richard indique que l'expression artistique en personne — « qu'il s'agisse d'un musée, de la peinture ou de la musique »— est un moyen de s'impliquer dans sa communauté et de réfléchir aux problèmes modernes auxquels les gens sont confrontés en tant que communautés.

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