La place des femmes à l’ONU : y en a-t-il réellement une?

Amélie Tanguay

(EN) This article touches on multiple important points relating to feminism in the field of international relations, gender equality within the United Nation (UN) and how its work culture encourages practices such as the upholding of a « boys club ». In view of these issues, one cannot help but raise concern for the next secretary-general election taking place at the UN. The changes that need to take place can only begin at the heart of the organization.


L’égalité homme-femme est au cœur de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée par l’Organisation des Nations Unies (ONU) en 1948. Près de 70 ans plus tard, neuf secrétaires généraux se sont succédés à la tête de l’organisation. Neuf hommes, et aucune femme: cherchez l’erreur. A travers une exploration de la place du féminisme dans les relations internationales, du rôle de l’ONU envers la parité des genres, et du processus de sélection du Secrétaire général, cet article cherche à démontrer la difficulté à laquelle les femmes de l’ONU font face.

Le féminisme et les relations internationales 

 Au cours des dernières années, de nombreux pays ont mis en place de différentes lois dans le but de protéger et défendre la condition de la femme; un but soutenu par un mouvement féministe qui prend de plus en plus d’ampleur. Mais pourtant, dans ces organisations internationales qui prônent l’égalité des sexes, les femmes ne figurent que très rarement à la tête de leurs postes les plus élevés de haut fonctionnaires et de direction. Du moins, c’est le cas de l’ONU où, près de 75 ans après sa création, aucune femme n’a été nommée au poste de Secrétaire Général. Alors pourquoi la femme n’a-t-elle jamais été représentée au poste de haut fonctionnaire au sein de cette même organisation qui affirme promouvoir le rôle de la femme? 

La parité hommes-femmes et l’ONU 
Au Québec, les femmes possèdent seulement le droit de vote depuis 1940 [1], alors que dans  d’autres pays, certaines n’y ont même pas encore droit. Le féminisme a multiples définitions dont celle d’un « mouvement militant pour l’amélioration et l’extension du rôle et des droits des femmes dans la société.[3] » Il est donc important pour les militantes féministes que les intérêts des femmes soient représentés dans la sphère politique, et que ces intérêts ne soient pas instrumentalisés par les dirigeants ainsi que les femmes ne soient pas considérées comme étant un groupe homogène[4]. 

Alors que l’ONU soutient de manière publique la cause féministe, le fait qu’aucune femme n’ait été nommée à sa tête ne reflète pas cette dévouement à la parité. De plus, c’est sans compter le fait que certains des États membres ne soutiennent que peu la condition des femmes. 

De la même manière, « plusieurs organisations internationales [...] ont adopté l’intégration de la dimension de genre, ou le terme “genre”, sans changer leur précédent objectif  “d’inclure des femmes et d’en attirer plusieurs autres” [dans une carrière reliée aux relations internationales][5] ». Comment une organisation qui a comme cinquième objectif de développement durable l’égalité entre les sexes[6] peut-elle être crédible si jamais elle n’a connu une femme au plus haut poste possible de sa bureaucratie? 

En 2020, ce sont 20 femmes qui ont été nommées à des postes de haute direction[7], mais toujours aucune au poste de Secrétaire général. Après le deuxième mandat de Ban-Ki Moon, la candidate prometteuse était Irina Bokova. Il est pertinent de mentionner que l’Assemblée Générale avait adopté une résolution plaidant pour qu’une femme soit nommée au titre de Secrétaire général. Pour Bokova, diplomate pour la Bulgarie et directrice générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO), mais également ancienne parlementaire et Ministre des Affaires Étrangères de son pays, son expérience sous-entendait que le poste lui était atteignable. Non loin derrière Bokova, Helen Clark était aussi en lice pour le poste. En effet, ancienne Première ministre de Nouvelle-Zélande pendant trois mandats et ensuite directrice du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), celle-ci s’avérait tout aussi compétente pour ce poste. Pourtant, malgré l’envie de l’Assemblée générale et les candidatures remarquables des deux femmes, c’est António Guterres qui fut nommé Secrétaire général[8]. La professeure et politologue Frédérique Matonti, dit que « ces rôles et ces activités paraissent aisément désajustés par rapport aux fonctions politiques les plus hautes qui, derrière l’universalité apparente, ont été en fait définies par et pour les hommes[9]. » 

Le boys club
Martine Delvaux est une écrivaine, militante féministe et professeure de littérature à l’Université du Québec à Montréal. Selon elle, le boys club est un lieu exclusivement fréquenté par les hommes puissants, soit un « groupe d’hommes âgés et fortunés qui détiennent un pouvoir politique[10] ». Autrement dit, les métiers traditionnellement réservés aux hommes sont difficilement atteignables pour les femmes. L’écrivaine dénonce le fait que les grandes institutions sont majoritairement dirigées par ce groupe minoritaire d’hommes[11]. Ce concept de boys club s’applique ainsi à l’ONU. Pour contrer ce manque de représentation des femmes, Delvaux dit qu’il faut augmenter et défendre la voix des femmes et des théories féministes [12]. 

Une femme nommée au poste de Secrétaire général de l’ONU? 

Selon la co-directrice de la division des Droits des femmes pour Human Rights Watch, pour que les 17 objectifs de développement durable (dont le cinquième concernant la parité homme-femme) soient crédibles, l’ONU devrait montrer l’exemple en nommant une femme à la tête de sa bureaucratie. Le changement devrait commencer en son sein[13]. 

C’est bien ce que compte faire Arora Akanksha, une Canadienne qui a récemment déposé sa candidature au poste de Secrétaire général de l’ONU. Âgée de seulement 34 ans, la fonctionnaire des Nations Unies pense que l’organisation pourrait être plus efficacement dirigée qu’elle ne l’est actuellement. Akanksha compte demander l’entérinement du Canada pour sa candidature après avoir obtenu plus de popularité sur les réseaux sociaux[14]. 

En espérant que cette fois-ci, une femme soit nommé à ce poste important et que cette Secrétaire Générale soit la première d’une longe lignée de femmes en position de pouvoir. 






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