La politique derrière la pauvreté et la réalisation des droits de la personne : Comment la pauvreté entraîne des violations de droits de la personne

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Min Xi

(EN) According to Hobbes, when individuals band together as sovereigns, they lose their human rights, thus illustrating an intimate link between politics and human rights. Furthermore, political decisions are often influenced by poverty. I will argue that political decisions are often made by discriminating against the disadvantaged population and depriving them of their rights as outlined in the Universal Declaration of Human Rights. This paper will focus on healthcare coverage in Canada and access to medicine in South Africa. This paper will also analyze and counter Thomas Sfeir-Younis' assertion that poverty is the result of a direct violation of human rights. Since politics, poverty, and human rights are intimately linked, a possible intervention to reduce global poverty would be to give impoverished people a voice in the policy process and to increase empathy for impoverished people among policymakers.


Introduction

« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. »[1] Cependant, la dignité avec laquelle les individus sont nés n’est pas toujours suffisante pour garantir les droits de la personne. Selon Hobbes, les individus se regroupent sous un souverain et ainsi perdent en partie leurs droits humains.[2]  Pour poursuivre la pensée de Hobbes, la perte des droits humains est souvent le résultat des décisions prises par les gouvernements pour des raisons économiques et, ces décisions semblent fréquemment cibler les individus et les pays appauvris. Cependant, la pauvreté ne peut pas être définie seulement par le revenu. Sfeir-Younis définit la pauvreté comme l’incapacité à accumuler du capital physique (ex., l’infrastructure), social (ex., l’éducation et le statut social) et financier.[3] Ici, on peut observer un lien intime entre la politique, la pauvreté et la réalisation des droits de la personne.[4] Contrairement à Sfeir-Younis qui propose que la pauvreté soit le résultat de violations des droits de la personne[4], je soutiens que les décisions politiques sont souvent prises en discriminant les populations défavorisées, privant ces populations de leurs droits tels qu’ils sont décrits dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Ce texte portera notamment sur la couverture des soins de santé au Canada et l’accès aux médicaments en Afrique du Sud. 

Discussion

Les réfugiés ont tendance à avoir une moins bonne santé physique et mentale que celle des autres citoyens.[5] Au Canada, les soins de santé pour les réfugiés sont réglementés par le Programme fédéral de Santé intérimaire (PFSI).[6] À l’origine, le programme couvrait les soins de santé de base et complémentaire, y compris l’accès aux médicaments, ainsi qu’aux soins dentaires et oculaires.[7,8] Entre 2010 et 2011, le programme a coûté 84,6 millions de dollars.[9,10] Cependant, le programme a subi une réforme par le gouvernement conservateur canadien en 2012 afin d’empêcher l’admission des réfugiés qui mentent dans leurs applications, dans le but réduire les dépenses publiques.[11,12] La réforme du PFSI a donné lieu à la division des réfugiés en trois catégories, selon la « sécurité » de leur pays d’origine.[13] De plus, le PFSI révisé a réduit la couverture maladie pour tous les réfugiés et a complètement éliminé les soins de santé pour quelques groupes de réfugiés en fonction de leur pays d’origine.[14] La gestion des maladies chroniques telles que le diabète ou les maladies cardiovasculaires a été rendue plus difficile par la perte de couverture des médicaments causée par la réforme du PFSI. Si ces problèmes de santé ne sont pas pris en charge, les patients risquent de ne pas pouvoir trouver un emploi stable en raison des complications de santé. Cela les conduirait à une pauvreté accrue. En 2010, le Canada a dépensé 228 milliards de dollars sur les soins de santé et seulement 84,6 millions de ces dollars ont été consacrés aux soins de santé des réfugiés.[15] Ainsi, pourquoi est-ce que les soins de santé des réfugiés ont été choisis comme cibles des réductions des dépenses du gouvernement ? Un aspect important à considérer est que les politiques de soins de santé sont envisagées et décidées principalement par les politiciens, dont plusieurs au statut social élevé, motivé par les gains économiques plutôt que par une empathie envers les personnes moins fortunées.[16] Par conséquent, on peut déterminer que les réfugiés ont été choisis comme cibles pour les restrictions budgétaires de soins de santé en grande partie en raison de leur incapacité à accumuler des richesses financières et du pouvoir et à monter l’échelle sociale en peu de temps. Les réformes résultant de la discrimination contre les personnes appauvries basées sur leur pays d’origine ont limité leur accès aux soins de santé : ceci viole l’Article 2 de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui affirme que « chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction… fondée sur le statut politique, juridique ou international du pays ou du territoire dont une personne est ressortissante ».[17] Dans ce cas, Sfeir-Younis ferait remarquer que la réforme du PFSI en 2012 a violé les droits de la personne et que cette violation a mené à l’allocation disproportionnée des ressources de soins de santé qui cause la pauvreté parmi les réfugiés.[18] Bien que la violation des droits de la personne ait perpétué la pauvreté parmi les réfugiés, la décision de réduire et/ou d’éliminer l’allocation des ressources financières et des soins de santé pour les réfugiés provient de leur manque de pouvoir politique et financier et de leur statut social. Cette étude de cas des soins de santé des réfugiés a démontré que les décisions politiques contre les personnes appauvries sont souvent motivées par le gain économique et ces décisions conduisent à des violations des droits de la personne.

Un autre exemple de l’engagement politique dans les enjeux liés à la pauvreté et aux droits de la personne est le manque de facilité d’accès aux médicaments contre le VIH en Afrique. La thérapie antirétrovirale (TAR) est utilisée pour contrôler la charge virale du VIH parmi les personnes infectées. Malheureusement, la TAR coûte à peu près 10 000 dollars américains par personne par année.[19] En raison de leur situation financière catastrophique et de la prévalence élevée du VIH, le gouvernement de l’Afrique du Sud a adopté la « Modification de l’acte sur les médicaments et substances apparentées » en 1997.[20] Cette modification a autorisé l’importation parallèle des médicaments et des substances apparentées.[21] Toutefois, la loi modifiée allait à l’encontre de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au Commerce (ADPIC), accord établi en 1995.[22] En conséquence, le gouvernement américain et la Commission européenne se sont présentés devant les tribunaux contre le gouvernement sud-africain pour sa violation de l’ADPIC.[23] Peu de temps après, le gouvernement américain et la Commission européenne ont été forcés à abandonner leurs poursuites contre le gouvernement sud-africain à cause de pression internationale.[24] Dans cette situation, l’ADPIC était une décision politique qui a servi à protéger les brevets pharmaceutiques internationaux en réduisant l’importation et l’utilisation des versions génériques des médicaments brevetés, versions qui sont beaucoup moins coûteuses. Dans ce cas, la pauvreté financière de l’Afrique du Sud était l’obstacle principal à l’accès à la TAR pour les personnes séropositives. La difficulté d’accès à la TAR est une violation de l’Article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui précise que « toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour… les soins médicaux ».[25] Sfeir-Younis pourrait prétendre que l’ADPIC était une violation de l’Article 25 parce qu’il prive les individus de l’accès à des soins médicaux abordables et que cette violation des droits de la personne entraîne la pauvreté des individus séropositifs sud-africains et du gouvernement sud-africain. Néanmoins, les motivations économiques qui sous-tendent la mise en place de l’ADPIC doivent être envisagées. On pourrait voir dans la création de l’ADPIC une tentative d’augmenter les coûts des soins de santé, particulièrement dans les pays à faibles et moyens revenus qui ont besoin d’importer des médicaments et d’autres produits pharmaceutiques. Ainsi, ces pays se verront appauvris et forcés d’emprunter plus d’argent auprès des pays développés, où les titulaires de brevets pharmaceutiques résident souvent. Par exemple, à peu près 7,06 millions d’individus séropositifs vivaient en Afrique du Sud en 2017.[26] Si chaque individu a besoin de 10 000 dollars américains pour la TAR, le gouvernement sud-africain aura besoin d’emprunter 7,06 milliards dollars américains chaque année, sans inclure les coûts de traitement supplémentaires pour les complications liées au VIH et aux autres conditions médicales. Afin de restituer l’argent emprunté, le gouvernement sud-africain aurait besoin de rembourser 7,06 milliards dollars américains, plus intérêts. Ce remboursement créerait un flux de revenus constant pour les gouvernements des pays développés au cours de plusieurs années. En appliquant ce raisonnement, on peut déduire que les politiques comme l’ADPIC ont été adoptées en ciblant les pays appauvris pour le gain économique des pays plus riches. Ces politiques conduisent souvent à des violations des droits de la personne qui tendent à aggraver la pauvreté.

Conclusion

En conclusion, ce document a analysé le rôle des décisions politiques dans la relation entre la pauvreté et les droits de la personne à travers deux études de cas : 1) l’accès des réfugiés aux soins de santé au Canada et 2) l’accès au TAR en Afrique du Sud. L’analyse de ces études a démontré que les décisions politiques ont tendance à cibler injustement les individus appauvris en violant leurs droits selon la Déclaration universelle des droits de l’homme. En accord avec Hobbes, la politique et les droits de la personne sont intimement reliés et sont difficiles à séparer. Ainsi, une intervention possible pour réduire la pauvreté mondiale consisterait à donner une voix aux individus appauvris au cours du processus d’élaboration des politiques et d’accroître l’empathie à l’égard de ces personnes parmi les décideurs politiques.


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